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Photo du rédacteurAnaïs Vanel

Renaître


Le souffle de la tempête frappe à la porte, comme pour m’inviter à la rejoindre, à courir sur les hauteurs, à virevolter, à écouter. J’ai suivi l’appel, ça m’a pris d’un coup, et rapidement, je me suis retrouvée au pied du chêne devant la ferme Martinhaurrenborda.



Là, sur les hauteurs, la tempête passe et n’emporte rien, à part les nuages. Les pottocks sont là, imperturbables face aux éléments qui se déchaînent. Peut-être parce que rien en eux ne répond à la nécessité de se dévoiler encore plus, ils ne sont pas concernés par cette invitation. Ils sont là, dans la nature, et ils ne sont même pas abandonnés à elle. Ils sont la nature. Tout comme nous, mais cela fait longtemps déjà que nous avons oublié ce langage.


Auprès des arbres il se réactive parfois, comme ici sous ce chêne, solide, qui se plie et ne retient pas ses feuilles, ses quelques branches qui s’envolent loin de lui tandis qu’il reste là, solide, dans un élégant lâcher-prise.


Cette année, la fête des morts me parle de toutes les parts de moi que j’ai dû laisser mourir pour que d’autres puissent vivre. Cette année, le portail entre les mondes s’ouvre mais aussi celui entre les temps et si l’on tend l’oreille on peut entendre les chants.


Aujourd’hui je vois les tempêtes d’automne comme les dernières invitations à nous délester, les dernières secousses pour lâcher ce qui doit mourir.


Peu importe que l’on croie au cycle des âmes, car ne serait-ce que dans cette vie, on se réincarne déjà tellement de fois. Peut-être que les croyances et rituels autour de la réincarnation peuvent devenir métaphore pour honorer toutes nos vies passées dans celle-ci ?


Je me souviens de cette adolescente rêvant du grand amour, d’un mariage et d’une tribu d’enfants. Je me souviens de cette jeune femme arrogante et de son refus de toute forme d’engagement. Je me souviens de cette enfant réservée, solitaire qui se fascinait pour les trous noirs, et passait son temps à interroger l’univers et ceux qui l’interrogeaient.


Désormais, regarder vers le ciel me donne le tournis. J’aime trouver mes réponses dans l’observation de la surface de la terre, dans ce minuscule caillou, et c’est cela qui semble mettre du sens dans l’ignorance, qui semble mettre de l’ordre dans le chaos. Aujourd’hui, je sais que l’on peut changer d’avis, à mesure que nos vies se réinventent et nous aussi. Qu’on peut aller d’un extrême à un autre, encore faut-il s’autoriser à le faire.


Des recherches récentes ont montré que les trous noirs ne sont pas des endroits qui seraient vides, mais au contraire des régions de l’espace où s’accumuleraient une très grande quantité de matière. Ils avaleraient les informations, et ainsi tout le passé pourrait donc être une illusion ; les trous noirs garderaient peut-être en eux les réponses de l'évolution de l'Univers, de la vie sur Terre et, ultimement, du genre humain.


Peut-être que les souvenirs fonctionnent ainsi, ils se représentent à nous, dans un dernier effort, avant de disparaître pour de bon, au fond d’un trou noir.


Quand je suis rentrée, la pluie a commencé. La tempête a tout nettoyé et j’ai entrepris d’écrire ma propre cosmogonie.


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